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Le blog Les dits du théâtre

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Les dits du théâtre, le blog de l'actualité théâtrale d’aujourd'hui


L’ARBRE À SANG d’ Angus Cerini

Publié par Dashiell Donello sur 26 Septembre 2023, 12:01pm

L’ARBRE À SANG d’ Angus Cerini

 

Angus Cerini résume son texte ainsi : «  j’ai écrit la pièce très rapidement, l’histoire est assez simple en fait : les trois femmes tuent quelqu’un et reçoivent trois visites ».

Ce quelqu’un, c’est un père, les trois femmes sont une mère et ses deux filles.

L’auteur précise aussi lors d’une interview : « Je voulais parler de la violence des hommes que les femmes subissent et de comment nous, en tant que société, nous restons là sans intervenir. »

Cela se passe dans une ferme isolée du bush australien (forêts et broussailles du sud-ouest), mais ce pourrait être ailleurs.

La mère et ses deux filles viennent de mettre fin à leur calvaire en tuant un homme mauvais qui abuse sexuellement de ses filles et fait violence sur sa femme : « L’a prise sans qu’elle dise oui, comme si qu’elle est à lui, pas vrai enflure, va ? ».

Cette comédie noire a des accents faulknériens plus par son côté rural que par l’écriture d’Angus Cerini qui elle lui est propre.

La violence faite aux femmes est hélas en expansion massive à travers le monde. Cela pourrait donc se passer n’importe où.

C’est la première fois que L’arbre à sang est monté en France.

C’est Tommy Milliot metteur en scène, et, récemment nommé à la direction du Centre dramatique national de Besançon, qui nous fait découvrir, aujourd’hui, cet auteur australien : Angus Cerini.

La question des violences domestiques a poussé le metteur en scène à faire traduire, L’arbre à sang, par Dominique Hollier. Ce texte à la couleur grotesque noire, dans sa violence permanente, comme le dit Cerini.

En entrant dans la salle nous voyons un dispositif scénique tri-frontal où trois femmes sont assises sur de simples chaises en bois. Nous supposons que la mise en scène sera donc sans superflu, et cela le sera.

Cela débute à la façon d’un conte, au service d’un texte incarné et central, mais il y a aussi un je-ne-sais-quoi de tragédie grecque, avec un chœur contemporain.

Les trois comédiennes sont à la fois les narratrices et les personnages de la pièce.

Telles des Érinyes persécutrices, elles racontent l’assassinat d’un père et mari, avec l’ivresse du devoir de vengeance à accomplir : « Il est face contre terre un calibre 12 contre la nuque (…) Et il voit nos doux visages devenus haine et abjection (…) Mais pas le temps de supplier parce que avec ça elle avance et tire ».

Un sentiment d'angoisse submerge les trois femmes, en présence du cadavre : «  La vache, il est mort pour de vrai ».

Que faire du corps ?

Monsieur Jones a-t-il entendu ou vu quelque chose ?

« Il partait en zigzaguant par ici, pis j’entends un coup de feu. Sûr que tout va bien ? (…) Faut dire c’est pas une lumière votre gars – sacré bougre de bon à rien, le pauvre con d’ivrogne ».

Tous les voisins qui passent se veulent rassurants : « Tout le monde sait ce qu’il a fait, ce qu’il est, on est avec toi mon chou, c’est comme ça c’est tout ».

Angus Cerini a beaucoup écrit sur la violence masculine.

À la suite d’une demande de contribution, il a eu l’idée d’un texte pour trois comédiennes en se posant la question : quel est le pire qu’on puisse accomplir ? : « (…) j’ai mis les trois personnages dans la situation d’avoir tué quelqu’un.

Puis je me suis demandé qui elles pourraient avoir tué, qui méritait de mourir. Et j’ai pensé qu’un père et mari agresseur sexuel méritait de mourir. C’est comme ça que la pièce a démarré ».

Cette tragédie chorale fait résonance dans notre esprit, et nous sidère longtemps après avoir quitté le théâtre, tant sa densité va loin dans l’effroi.

Tout nous revient à l’esprit des maux et des questions de nos sociétés : les féminicides, les viols, faire justice soi-même, la peine de mort pour les délinquants sexuels, les non- dits, etc.

Angus Cerini est dans le questionnement de la violence permanente de son pays, l’Australie : « est-ce à cause de la manière dont le pays s’est formé, à travers des massacres, des génocides… ».

Nous aussi sommes dans l’incompréhension de cette violence qui, comme un feu de brousse, ravage le monde entier et ne cesse de croitre sans trouver l’eau salvatrice qui pourrait l’éteindre.

Peut-être, nous faudrait-il un peu plus de courage, semble nous dire Cerini.

Merci à Tommy Milliot, et à toute sa troupe, de nous avoir fait découvrir cet auteur talentueux.

Nous espérons lire, voir, entendre ses autres pièces.

Qu’elles seront traduites et jouer un peu partout en France et en Europe, car nous avons besoin de dramaturge comme Angus Cerini.

 

L’Arbre à Sang 

D’Angus Cerini

Du 25 septembre au 5 octobre

Durée 1 heure

Traduction Dominique Hollier

Mise en scène, scénographie et costumes Tommy Milliot

Création lumière Nicolas Marie

Dramaturgie Sarah Cillaire

Assistanat à la mise en scène Matthieu Heydon

Avec Lena Garrel, Dominique Hollier et Aude Rouanet

 

L'arbre à Sang à été produit et créé par la comédie de Béthune dans le cadre de l'Itinérance.

 

 

LES PLATEAUX SAUVAGES

5, rue des Plâtrières

75020 Paris

https://lesplateauxsauvages.fr

 

En tournée

Actoral-Festival des arts et des écritures contemporaines Marseille (13)

7 octobre 2023

Le Centquatre Paris (75)

2 au 10 février 2024

Théâtre Joliette Marseille (13)

10 au 12 avril 2024

 

 

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